Au Togo, le mouvement citoyen Touche Pas à Ma Constitution, regroupant une vingtaine d’organisations de la société civile et de partis politiques, a tiré la sonnette d’alarme mercredi en dévoilant un sombre tableau de la gestion des finances publiques au Togo. S’appuyant sur les rapports de la Cour des comptes des exercices 2020, 2021 et 2022, les conclusions interpellent : où vont les revenus des principales ressources économiques du pays, le phosphate et le port autonome de Lomé ?
C’est un tableau sombre de la gestion publique au Togo qui est présenté dans le rapport du front. La Société Nationale de Phosphates du Togo (SNPT), fleuron de l’industrie minière et troisième producteur de phosphates en Afrique, semble être un mirage budgétaire. Bien que le phosphate représente 40 % des recettes d’exportation du pays, cette entreprise publique n’aurait versé aucun dividende au budget de l’État entre 2020 et 2022.
Aussi, selon toujours les conclusions du rapport du Front, le port autonome de Lomé, unique port en eau profonde naturelle de l’Afrique de l’Ouest et premier sur la côte ouest subsaharienne en termes de conteneurs, est supposé être le poumon économique du pays. Pourtant, sa contribution au budget national du pays est ridicule, voire insignifiante : seulement 1 milliard de francs CFA en 2022, soit une goutte d’eau dans un budget de 1 875 milliards de francs CFA. Un vrai paradoxe soulève une question légitime : où disparaissent les revenus générés par cette infrastructure stratégique ? Une anomalie inexplicable qui soulève des questions sur la transparence de la gestion de cette ressource stratégique.
Une Cour des comptes sous pression
De manière générale, rapporte le Front, les sociétés à participation étatique ne contribuent que 15,5 milliards de francs CFA par an au budget de l’Etat, une somme dérisoire comparée aux ambitions économiques du Togo et performances économiques de son voisin de l’Est, le Bénin. Aussi, les dépassements budgétaires observés dans plusieurs ministères atteignent des proportions vertigineuses, parfois à plus de 100 000 %. Ces excès, qualifiés d’« effrayants » par les analystes, n’est que symptomatique d’une gestion laxiste et, possiblement, des pratiques douteuses. Pire encore, certains ministères, selon le front, refuserait purement et simplement de fournir les documents nécessaires aux contrôles de la Cour des comptes, ajoutant à l’opacité ambiante.
La lenteur dans la production des rapports de la Cour des comptes est également symptomatique de dysfonctionnements structurels. Alors qu’un exercice budgétaire devrait être audité dans un délai d’un trimestre, il a fallu deux ans pour finaliser celui de 2022. Une situation qui fragilise le suivi des finances publiques et permet aux mauvaises pratiques de prospérer.
Le mouvement Touche Pas à Ma Constitution appelle donc le gouvernement à s’expliquer sur l’utilisation des ressources clés du pays. Pour le Front, la gestion des finances publiques semble être devenue une opportunité d’enrichissement pour une minorité, au détriment du bien commun. Les Togolais méritent des réponses claires sur le sort de leurs ressources naturelles et des revenus des infrastructures stratégiques.