Les personnes impliquées dans le dossier casse d’une banque seront bientôt fixées sur leur sort. A l’audience du jeudi 21 Décembre 2023, le ministère publique dans ses réquisitions a requis 10 ans de prison contre l’ancien député Désiré Vodonou et ses coaccusés.
Le procureur spécial a requis des peines sévères à l’encontre de l’ancien député Désiré Vodonou, un chef d’agence de BGFI Bank et un informaticien poursuivis dans le cadre du dossier de « casse de banque ». Il a demandé la requalification des faits, les accusant spécifiquement d’avoir entravé le fonctionnement d’un système informatique en vue d’un profit et d’avoir participé à des activités de blanchiment de capitaux.
Le magistrat a demandé à la Cour de maintenir les trois accusés dans le lien de l’infraction tout en demandant leur relaxe pour les faits d’escroquerie en raison de doutes sur l’origine des fonds en question. Le ministère public a requis une peine de dix ans de prison ferme et une amende de 50 millions de FCFA à l’encontre de chacun des trois prévenus. De plus, il a suggéré à la Cour de fixer le montant des préjudices causés à la banque à hauteur des dommages et de saisir tous les biens des prévenus révélés par l’enquête patrimoniale.
L’avocat de la banque a également réclamé le paiement d’une somme de cent millions de francs CFA par mis en cause pour réparation des préjudices causés à la structure bancaire.
Il est reproché aux accusés d’avoir apposé un appareil dans le système informatique de la banque, avec l’aide du chef d’agence, dans le but de retirer de l’argent des comptes bancaires. Selon le rapport d’enquête, cet appareil est resté en place pendant plusieurs jours, entre le 12 septembre 2022 et le 04 novembre 2022, avant que les prévenus ne soient démasqués par un informaticien de la banque qu’ils avaient sollicité pour les aider dans leur entreprise criminelle.
Retour sur les faits …
Devant le juge en charge du dossier, les mis en cause ont livré chacun leur version des faits. De leurs interventions, il en ressort une explication détaillée de l’opération frauduleuse pour laquelle ils ont été arrêtés.
Désiré Vodonou n’a pas rejeté les faits portés contre sa personne, mais face au juge, il a tenu à faire des clarifications. « L’opération pour laquelle j’ai été arrêté s’appelle server to server », a t-il déclaré. Il a confié qu’il voulait réaliser cette opération au profit d’un partenaire d’affaires russe.
Selon l’ex-député, cette opération réalisée par des oligarques russes consiste à envoyer de l’argent depuis la Russie en direction de l’Afrique. Selon ses explications, le but de cette transaction peu catholique, c’est de contourner les sanctions imposées à la Russie à cause de la guerre en Ukraine. Selon les dires de Désiré Vodonou, il n’a donc pas été question de voler une banque au Bénin. «Â Désiré Vodonou ne va jamais voler une banque au Bénin », a-t-il juré.
Dans la suite de son récit, Désiré Vodonou a déclaré avoir été contacté par le Russe. Par la suite, il a été également en contact avec le représentant du russe, un Ivoirien.
Ces échanges lui ont permis de cerner l’opération dans la pratique. Ainsi, il a expliqué que lorsque l’argent sera récupéré via le « server to server », il sera ensuite redistribué sur des cartes prépayées au Bénin et en Côte d’Ivoire.
Mais l’opération a vite pris du plomb dans l’aile. L’ex-parlementaire dit avoir abandonné le projet, notamment « l’introduction dans le système informatique » de la banque, lorsqu’il a appris que le dossier allait être géré par un chef d’agence. « Écoutez, c’est Désiré Vodonou, je ne vais pas vouloir faire une affaire de centaines de millions d’euros et la faire avec un chef d’agence d’une banque », a-t-il dit .
Selon l’homme d’affaires béninois, il s’agit d’une opération à haut risque nécessite la complicité d’un haut responsable de la banque. C’est pourquoi, il affirme avoir vite abandonné. Si Désiré Vodonou dit avoir abandonné le projet, celà n’a visiblement pas été le cas chez le chef d’agence de la banque, le sieur Sylvestre A. et l’informaticien Sénégalais Sy S. A. A.. Ils auraient poursuivi l’opération à l’insu de Désiré Vodonou.
Ce que Sylvestre A. et l’informaticien sénégalais ont dit à la barre
Convoqué à la barre avant Désiré Vodonou, le chef d’agence et l’informaticien sénégalais ont livré leur part de vérité. Sylvestre A. a avoué avoir rencontré Sy S. A. A. dans un hôtel à Cotonou où il a visionné en photo l’appareil qui devrait permettre l’introduction dans le système informatique de la banque.
A son tour, le sénégalais a précisé que cette rencontre s’est tenue en présence d’un intermédiaire qui avait les détails sur les tenants et aboutissants de l’opération. Il a également confié que l’objectif de cette opération de convaincre un informaticien interne en service au sein de la banque pour porter main forte au chef d’agence.
Revenu à la barre, le chef d’agence Sylvestre A. a confié qu’il a reçu l’appareil, l’outil principal de l’opération. Selon ses déclarations, il avait même déjà introduit le matériel dans le système de la banque, mais l’opération n’a pas marché. C’est ainsi qu’il a entrepris de solliciter l’aide d’un informaticien de la banque. Celui-ci, a décliné l’offre avec stratégie et l’aurait par la suite dénoncé.
Il faut signaler que l’Ivoirien, présenté comme le représentant de l’homme d’affaires russe a pris la clé des champs. Selon Désiré Vodonou, l’intéressé a fui depuis qu’il a compris qu’il s’agissait d’une infiltration d’un système bancaire.