En Guinée-Bissau, le président Umaro Sissoco Embaló a trouvé la panacée pour se relancer à la quête d’un nouveau mandat. Et pourtant l’annonce est de ne pas être candidat. Elle est si tonitruante, qu’elle révèle tout l’artifice autour. Un président africain qui a la possibilité d’un second mandat et qui renonce à être en lice.
Fait rarissime, dans les mémoires trône la légendaire sortie haut les mains de Nelson Mandela, qui a renoncé au pouvoir après un seul mandat de cinq ans (1994-1999). Pis, seuls quelques rares comme, Nicéphore Soglo du Bénin en 1996, et George Weah du Libéria en 2024 ont accepté leur défaite au renouvellement de leur premier mandat.
La majorité a souvent considéré son élection comme un double mandat de fait. S’ils ne sont piqués par le virus du pouvoir à vie, avec des révisions constitutionnelles qui offrent un énième premier mandat, ou sautent le verrou de la limitation des mandats, voir encore d’autres alchimies comme le changement de régime politique.
Dans la plupart des pays, avant que le locataire ne cède son siège après le double mandat constitutionnel, il faut l’y contraindre en y veillant comme sur du lait sur le feu ; voir offrir des gages. Les exemples sont légions sur le continent.
Une situation récurrente qui a fait susciter une vague d’adhésion au projet politique du candidat Patrice Talon au Bénin à la présidentielle de 2016, avec l’idée d’un quinquennat sec. Chose à laquelle l’homme de la « Rupture » et du « Nouveau départ » au Bénin, n’a pas attendu longtemps avant d’annoncer son « J’aviserai ». Ramené à la realpolitik, suite au rejet de l’opposition de son projet de révision de la constitution en 2017.
Ballon d’essai ? Â
L’annonce de ne pas briguer un second mandat en 2025 de Embaló a fait l’effet de surprise, le 11 septembre dernier. Mais dès le lendemain, il n’a pas exclu la possibilité de « reconsidérer » sa non-candidature, joint par Jeune Afrique.
Une posture qui laisse entrevoir tout l’artifice autour de sa précédente annonce d’une décision prise des suites d’un conseil de famille en plein vol de retour d’un voyage avec son épouse. La probabilité de reconsidérer sa position est toute évocatrice, bien que n’étant pas revenu sur sa déclaration de non candidature.
Embaló semble avoir conscience de l’effet d’annonce et trouvé le raccourcit bien à dessein. Son argumentaire pour soutenir un éventuel revirement soutient-il est d’avoir constaté que la population est tétanisée et que certains sont endeuillés, depuis l’annonce de sa décision.
Une belle trouvaille pour créer le mythe autour de sa probable candidature à environ un an de la présidentielle de novembre 2025.
Opération déminage ?
L’une des stratégies pour gagner un scrutin annoncé difficile, est sa capacité à discréditer ses challengers et légitimer sa candidature. Embaló dont le résultat de l’élection de décembre 2019 qui l’a donné vainqueur a fait suite  à des mois de contestations, semble avoir pris la mesure de l’enjeu.
Investi en février 2020 pour un mandat de cinq ans, les législatives de juin 2023 ont été remportées par l’opposition, le contraignant à une très délicate cohabitation avec son principal adversaire, Domingos Simões Pereira.
Six mois plus tard, le 4 décembre 2023, après une tentative de coup de force menée par des éléments de la Garde nationale, la panacée a été la dissolution du Parlement avant d’annoncer pour fin 2024, la tenue de nouvelles élections législatives qui pourraient finalement être couplées avec la présidentielle de 2025.
Fin stratège ou mélangeur de pinceaux ?
En, Guinée-Bissau, pays tropical situé sur la côte atlantique de l’Afrique de l’Ouest de 36 120 km², Embaló qui se positionne sur un certain piédestal, soutient son désormais ‘’éventuel’’ retrait, au motif de ne pas vouloir se « rabaisser » au niveau de ses adversaires politiques, Domingos Simoes Pereira, Nuno Nabiam, et Braima Camara. Ne les voyant d’ailleurs pas de poigne pour le remplacer. Mais plutôt une autre personne bien meilleure.
Confiance excessive ou coup de poing en dessous de la ceinture ?
Le futur chef d’État devra faire preuve d’une plus grande honnêteté et d’un plus grand sérieux que la classe politique actuelle argue-t-il, avec un point donneur fait au mérite la Guinée-Bissau.
Avec cet argumentaire, Embaló va-t-il réussir à défaire ses adversaires et emballer ses concitoyens en marge de la présidentielle prochaine ? Cela semble être son plus gros challenge. Car, « il ne faut pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué ».