Des milliers de Haïtiens ont manifesté lundi à Port-au-Prince pour protester contre le gouvernement et son appel à l’aide étrangère afin de faire face à l’insécurité endémique, à la crise humanitaire et à une épidémie naissante de choléra.
Soutenu par le patron de l’Onu, le Premier ministre haïtien réclame une intervention armée internationale pour mettre au pas les groupes criminels qui contrôlent une partie du pays. Mais il n’est pas sûr que la population l’accepte.
Lundi, plusieurs milliers d’haïtiens ont battu le macadam, répondant aux appels de l’opposition pour protester contre le gouvernement et son appel à l’aide étrangère. À Port au Prince, des barricades de pneus enflammés et de branches d’arbre ont été rapportées sur la route de Lalue alors que de nombreux axes routiers étaient bloqués et les commerces fermés. La manifestation dans la capitale a été émaillée de violence, de scènes de pillage et la police a dû faire usage de gaz lacrymogènes pour disperser les pilleurs. On rapporte plusieurs blessées par balle et une personne tuée dans des circonstances non élucidées.
Le terminal pétrolier aux mains des gangs
Face à un État failli
, les groupes criminels ont pris le contrôle d’une partie du pays et de la capitale Port-au-Prince. Exemples parmi tant d’autres ? Le terminal pétrolier de Varreux, par lequel arrivent 70 % des carburants dans un pays qui n’en produit pas, est bloqué par une alliance de deux gangs. Les voitures sont à l’arrêt, comme les groupes électrogènes, indispensables pour pallier le réseau électrique en miettes, notamment dans les hôpitaux. À cause de l’insécurité généralisée, la rentrée des classes prévue le 5 septembre a été repoussée d’un mois, puis annulée.
Mémoire de l’esclavage
Malgré les souffrances qu’ils endurent, très peu d’Haïtiens souhaitent une intervention armée étrangère, surtout si elle est demandée par un Premier ministre largement discrédité. L’idée s’accommode peu avec la mémoire toujours vivace de l’esclavage. Et surtout personne n’a oublié que le dernier séjour des Casques bleus des Nations unies dans le pays (2004-2017), n’avait pas réglé les problèmes de fond. Il s’était même soldé par… une épidémie de choléra, partie du camp de soldats népalais de l’Onu !